Frais cachés en portage : le point sur l'affaire des marges arrières

Écrit par Romain
Publié le 16/08/2022
La transparence en portage salarial
Un peu de contexte
Pour rappel, le portage salarial est une relation tripartite entre un travailleur indépendant, son client, et une entreprise de portage salarial. Le freelance délègue la partie administrative de son activité à l'entreprise de portage (contractualisation, facturation, versement des cotisations à l'Urssaf) dans le cadre d'un CDI ou d'un CDD de portage salarial. Le consultant choisi ses clients et fixe ses tarifs. Quand il trouve un accord avec un client potentiel, celui signe un contrat de prestation avec l'entreprise de portage salarial.
L'avantage principal du portage salarial pour le travailleur indépendant, est qu'il a le statut de salarié. Il bénéficie ainsi de la même couverture sociale que toutes les personnes affiliées au régime général : assurance-chômage, indemnités en cas d'arrêt maladie, retraite. Son statut de salarié lui donne également accès aux avantages prévus par le code du travail : RCP, mutuelle, remboursement des frais de déplacement.
Mais ce statut n'a pas toujours été la panacée. Depuis sa création, le combat pour en définir un cadre légal et protéger les salariés portés n'a pas été un long fleuve tranquille. Par exemple, ce n'est qu'en 2017 qu'une convention collective du portage salarial a été négociée. Pire encore, au début des années 2010, un scandale a secoué le petit monde du portage salarial. En cause ? L’application par certaines sociétés de portage de “marges arrières”. Autrement dit ? Des charges et frais supplémentaires prélevés directement sur les bulletins de paie des salariés portés, afin d’augmenter (discrètement) la marge des sociétés de portage. Sauf que, en plus d'être parfaitement illégale, cette pratique est faite de façon très peu transparente (c'est d'ailleurs ce qui lui a permis de perdurer !) et il est évidemment difficile pour le consultant d’en identifier l’origine. Certains auraient ainsi perdu, au fil des années, des dizaines de milliers d’euros.
Le cadrage des frais de gestion
Le portage salarial est un marché de niche et en très forte tension. Il concernait 100 000 indépendants en 2020, pour plusieurs dizaines d'entreprises de portage salarial. Les barrières à l'entrée étant minimes, des nouveaux acteurs apparaissent régulièrement.
Dans ce contexte, certaines sociétés de portage salarial ont décidé de baisser déraisonnablement leurs frais de gestion (qui sont versés en l’échange du service rendu par l’entreprise de portage), jusqu'à un niveau qui n'était manifestement plus viable. Certains taux de gestion frôlaient ainsi les 2 à 3 % (contre 5 à 10 % en moyenne sur le marché).
Ces taux bas ont évidemment attiré de nombreux salariés portés. Cependant, même avec un grand nombre de nouveaux salarié, les sociétés concernées n'arrivaient pas à compenser les pertes consenties lors de l'abaissement des taux de gestion.
En général, les frais de gestion correspondent à un pourcentage du chiffre d'affaires. Ce dernier est visible sur le détail du compte d’activité du salarié porté. Une relation censée être basée sur la confiance et la transparence, et qui pourtant ne l’est pas souvent.
Côté consultant, intuitivement, des frais de gestion faibles sont synonymes de revenus maximisés. Sauf que, dans la pratique, une fois le contrat de travail signé, les cotisations patronales étaient gonflées et le salaire se retrouvait amputé de plusieurs dizaines d'euros chaque mois. Ce sont les affres des appellations juridiques et du jargon du bulletin de paie.
C'est d'ailleurs pour cette raison que, lorsque vous recherchez la société de portage de vos rêves, nous vous conseillons de réaliser des simulations de salaire. Vous pourrez ainsi comparer le revenu net que vous toucherez chaque mois, qui est un meilleur indicateur que les frais de gestion. En effet, de nombreux facteurs influencent le montant des cotisations patronales et salariales que vous aurez à payer sur votre facturation, notamment la taille de l'entreprise de portage et son ancienneté. Les entreprises de portage salariales les plus chères ne sont pas forcément celles qui vous verseront le salaire le plus bas !
Les frais cachés en portage salarial
Revenons ici au sujet des « marges arrières ». L’idée ? Surévaluer certaines cotisations patronales dues par le salarié porté. L'introduction des bulletins de paie simplifiés a permis à cette pratique de perdurer en toute impunité. En effet, la mention "Autres cotisations dues par l'employeur" sans détail permet de cacher les cotisations artificiellement gonflées. D'ailleurs, un des premiers signes qui doit vous alerter sur le fait que vous êtes peut-être victime de marges arrières est que le montant de cotisations sociales diffère entre votre compte d’activité et votre fiche de paie.
Détectez les frais cachés de votre entreprise de portage
Concrètement, voici 3 façons de vérifier si vous êtes, ou non, victime de frais cachés de la part de votre entreprise de portage salarial :
- Le ratio : Vérifiez le taux de cotisations patronales visible directement sur la fiche de paie. Normalement, il doit être autour de 43 à 49% du chiffre d'affaires. S'il est supérieur, c’est que l’entreprise pratique une surévaluation des cotisations sociales, n'hésitez pas demander un bulletin de salaire non simplifié pour avoir la vue sur l'ensemble des lignes de cotisations. Vérifier également le contenu de ces cotisations patronales. Souvent des frais y sont ajoutés alors qu’ils ne devraient pas y être, comme notamment responsabilité civile professionnelle ou la CVAE.
- Le coût des cotisations : Ce coût doit être cohérent avec les taux annoncés sur les sites des différents organismes de cotisations sociales (URSSAF, impôts, etc.).
- Les commissions de gestion : Celles-ci doivent être explicitement détaillées sur votre contrat commercial avec la structure de portage (convention d'adhésion ou convention de portage).
Vous avez un doute sur un document ? Vous souhaitez que l’on vous accompagne et que l'on vous aide à décortiquer une fiche de paie ? Faites-nous signe, nous serons ravis de vous répondre !
Conseils pour identifier et se prémunir des frais cachés
Les frais cachés sont un véritable problème dans le milieu du portage salarial.
D’une part, ils remettent en question tout l’avantage du portage salarial : se décharger en toute confiance de la gestion administrative, sociale et comptable de son activité pour se concentrer sur sur son métier (prospecter ses clients et réaliser ses missions). Or, si le consultant doit vérifier l’ensemble des actions mises en place par la société de portage, cela n’a tout simplement plus de sens. Il va alors perdre non seulement du temps mais aussi de l’argent (et de la tranquillité d’esprit).
D’autre part, ces pratiques de frais cachés sont tout simplement en dehors du cadre de la loi. Non seulement les sociétés de portage surfacturent des commissions en les faisant passer pour des charges inhérentes à l'activité du salarié porté, ou des cotisations sociales, fiscales ou parafiscales (C3S, assurance responsabilité civile, CVAE - cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, etc.), afin d’augmenter leur rémunération, mais elles sont aussi capables de modifier le calcul des cotisations. La plupart sont calculées comme un pourcentage du chiffre d'affaires alors que c’est censé être un montant fixe. Forcément, ça crée ainsi des sommes très conséquentes.
Enfin, les sociétés de portage dont la communication ne tourne qu'autour des frais de gestion incite tout simplement à l’erreur. En effet, avec ce type d'orientation, le consultant ne peut malheureusement pas avoir une vision claire et réelle du revenu qu’il va pouvoir toucher. Il ne peut donc pas choisir en toute connaissance de cause l’entreprise qui lui correspond le mieux.
Heureusement, il existe des solutions. Une en particulier. On vous explique.
Un label sérieux pour les salariés portés
Face à tous ces scandales, un résistance se met en place. La principale initiative provient de Sylvain Mounier, qui a créé la Fedep's (l'assocation des salariés en portage salarial - Fédération Éthique des Entreprises de Portage Salarial) et son Label Zéro Frais Cachés.
L’objectif du Label est de protéger les salariés portés et encourager les entreprises de portage salarial à adopter des pratiques plus transparentes et saines. Autrement dit ? Garantir l’absence de frais cachés.
Le Label Zéro Frais Cachés a été reconnu marque de qualité par l'INPI en 2022. Cela renforce sa légitimité et prouve le sérieux de sa méthodologie, ainsi que le réelle transparence des entreprises détentrices de ce label.
Qu'est ce qu'une société labellisée Zéro Frais Cachés
Les 5 engagements du label Zéro Frais Cachés
Le label Zéro Frais Cachés met en avant 5 critères clés :
- Zéro surfacturation des cotisations patronales : Les cotisations patronales obligatoires sont légalement définies par les organismes de cotisation et sont facilement vérifiables sur leurs sites. Le label s’assure que toutes les cotisations des sociétés labellisées soient correctement calculées et appliquées.
- Absence de frais cachés dans un «coefficient de rétrocession»
- Des frais de gestion clairs et transparents : Cela devrait être à la base… Et pourtant. En attendant que les choses soient mieux contrôlées, le label s’assure ainsi que la société de portage présente une offre commerciale transparente qui ne prête pas à confusion et que cette dernière ne déduise pas un montant supérieur au coût total indiqué sur vos simulations (lors de vos premiers échanges avec la société de portage).
- Une TVA récupérée et reversée : La société de portage a la possibilité de récupérer la TVA sur vos notes de frais. Lorsqu'elle le fait, ce montant doit logiquement vous être reversé sur votre bulletin de salaire, ce qui n’est pas toujours fait. La Fedep’s s’assure ainsi que ce soit bien le cas. Et cela peut faire une grosse différence, la TVA étant à hauteur de 20% !
- Les financements, crédits, aides vous sont reversés : En tant que salarié, vous cumulez des droits et avantages (formation, crédit d’impôt, allègement de charges, etc.). Le label s’assure que vous soyez bien informé de ces points et surtout que les montants correspondant vous soient bien versés.
- Une simulation claire et complète : Parfois, entre la simulation transmise par la société de portage et le vrai bulletin de salaire, c'est la douche froide Martine ! Les simulations proposées par les sociétés de portage ne prennent pas toujours en compte les fameuses marges arrières. Et dans la pratique, on est donc bien loin du salaire que vous allez toucher réellement. La Fedep’s s’assure que les outils de simulation proposés garantissent une bonne visibilité et une véritable fiabilité sur le revenu futur.
L’audit réalisé pour l’obtention du label Zéro Frais Cachés
Afin d’attribuer ce fameux label, un audit est réalisé par un cabinet externe et indépendant. Ce dernier est fait tous les deux ans, afin de s’assurer du bon respect des engagements d'éthique et de transparence du label et ce, sur le long terme. Concrètement, comment se passe l’audit ? Le cabinet tiers va analyser l’ensemble des contrats des consultants, les bulletins de salaire, les comptes d’activité des salariés portés, l’outil de simulation proposé, le montant des frais de gestion mis en avant ainsi que l'offre commerciale de la société de portage. Il est alors attendu de la part de la société de portage salarial la transparence la plus totale.
Cet audit est réalisé directement dans les locaux de l’entreprise de portage salarial. Tout est passé au crible. Juridique, social, fiscal, comptable, communication, … Le but ? S'assurer du respect des règles établies par le label et de la cohérence entre les messages communiqués par l’entreprise et leur concrétisation. L’auditeur vérifie également l’extranet du salarié porté. Il s’assure ainsi que ce dernier ait bien accès à l’ensemble des informations et des documents nécessaires (bulletin de salaire, etc.).
Les 8 sociétés labellisées Zéro Frais Cachés aujourd’hui
Aujourd’hui, il existe plus de 300 sociétés de portage en France. Parmi elles, seules 8 ont fait la démarche et obtenu le label Zéro Frais Cachés. Voici la liste :
- PRIUM PORTAGE (label obtenu en 2020)
- ADDEXPERT (label obtenu en 2020)
- EMBARQ (label obtenu en 2020)
- PLUG & PAY - ex Nexagora (label obtenu en 2020)
- PORTIFY (label obtenu en 2021)
- RÉGIE PORTAGE (label obtenu en 2020)
- STA PORTAGE (label obtenu en 2020)
Embarq est parmi les entreprises pionnières sur le sujet. C’est un engagement fort pour nous et à notre sens un véritable enjeu pour l’avenir du secteur. Nous nous engageons chaque jour pour lutter contre les pratiques douteuses et pour rendre le monde du portage salarial plus transparent.
Crédit photo : Freepik - wayhomestudio
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